Revue de Presse

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De Lambretta à Fenwick : la saga de l'usine phare de Saint-Julien


Jacques Fournier a retracé hier, à la maison du patrimoine, l'histoire de cette usine qui a donné du travail à jusqu'à 1150 personnes.

Jorge D'HULST


De l'ancienne usine phare de Saint-Julien-les-Villas, il ne subsiste plus que quelques bâtiments, derrière l'Intermarché des Rives de Seine. Comme sur son site se dresse aujourd'hui un hypermarché, on a du mal à imaginer que jusqu'à 1150 personnes y ont travaillé lorsque Fenwick y fabriquait ses chariots élévateurs et 870 salariés lorsque Lambretta y produisait ses scooters.
La mémoire de cette usine aurait fini par s'estomper si un passionné d'histoire locale, Jacques Fournier, n'avait eu le courage de la rassembler. À force de recherches, le co-fondateur de l'académie troyenne d'études cartophiles est parvenu à en retracer la saga. Il l'a racontée hier, au cours d'une conférence, à la maison du patrimoine.
Contrairement à ce l'on pense souvent, l'histoire de ce site industriel ne commence pas avec Lambretta. Bien avant l'arrivée de la production de cette marque italienne se dressait là une teinturerie, celle du Petit Saint-Julien. Elle a vu le jour en 1874 et a arrêté son activité en 1935, à la veille de la seconde guerre mondiale.
Entre cette date et 1949, il existe un blanc. « On sait que l'usine a été utilisée par les Allemands pendant la seconde guerre mondiale et qu'elle a été bombardée. Mais quand, par qui et pourquoi ? On l'ignore », confie Jacques Fournier.
L'usine appartenait déjà à Fenwick avant Lambretta
Par contre, à partir de 1949, son histoire devient mieux connue. L'ancienne teinturerie est alors rachetée par Fenwick, une société française fondée par un Écossais. Elle n'y fabrique pas encore des chariots élévateurs mais des ponts levants et de la chaudronnerie. Une activité qui ne devait pas être si florissante que cela puisque Fenwick y implante, en 1952, la fabrication des Lambretta pour la France.
En moins de dix ans, 200 000 scooters ainsi que 10 000 triporteurs vont sortir de l'usine de Saint-Julien-les-Villas. Celle-ci ne fait pas que les assembler. Jacques Fournier a récupéré auprès des Lambrettistes un film qui montre que tout était fabriqué sur place, y compris les moteurs.
En 1960, Lambretta arrête la fabrication des scooters à Saint-Julien puis l'année suivante celle des triporteurs. Car, avec la guerre d'Algérie qui maintient la clientèle jeune sous les drapeaux pendant deux ans, deux fortes hausses successives de la TVA, le coût prohibitif des assurances et l'essor pris par l'automobile, les ventes de scooters se sont effondrées.
Fenwick reconvertit alors une nouvelle fois son site. Il y fabrique désormais les chariots élévateurs, sa spécialité. L'usine, qui avait déjà pris de l'ampleur sous Lambretta, est encore agrandie. En 1970, elle compte 1 150 salariés. Quatre ans plus tard, en 1974, elle est tombée à 1 125 personnes mais emploie 250 intérimaires. C'est probablement son apogée. Car en 1978, débutent les premiers licenciements. Cinq ans, plus tard, en 1984, c'est la fermeture de l'usine avec 515 personnes qui perdent d'un seul coup leur emploi. Un traumatisme qui reste encore dans les mémoires.
Fenwick est alors racheté par Linde. Depuis les chariots élévateurs sont fabriqués en Allemagne. Quant aux scooters Lambretta, ils ont continué à sortir de l'usine italienne jusqu'en 1971, jusqu'à ce que des Indiens acquièrent les machines et poursuivent la production dans leur pays. « Aux dernières nouvelles, il ne subsisterait plus qu'une vague fabrication en Chine. Ce n'est plus la même chose », remarque Jacques Fournier.


Jacques Fournier a réussi à rassembler l'histoire de l'usine qui, avant de produire les chariots élévateurs Fenwick, a fabriqué les scooters Lambretta pour la France
Article paru le : 24 janvier 2010

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